Avec ces deux films, Miljohn Ruperto évoque des états liminaires entre la vie et un possible au-delà, testant nos seuils de perception. Les transitions d'une forme à la suivante sont anticipées mais jamais complètes. Cette simultanéité déroutante de présences quasi antagonistes, soutenue par une temporalité dilatée, stimule l'imaginaire et interpelle nos perceptions, croyances et connaissances. 

Empruntant son titre au dieu romain bicéphale des moments de transition, des commencements et des fins, Janus reprend l'illusion du lapin-canard rendue célèbre par Wittgenstein. Emblème à la fois des limites et de l’expansion possible de nos capacités de perception, le lapin-canard est ici animé de telle sorte que l'une ou l'autre des créatures semble à l'aube de la mort. Les cycles respiratoires laborieux servent de chronomètre à la boucle répétée. À travers l'objectif cinématographique, cette lutte devient un mélodrame, appelant le spectateur à s'identifier à cette image bivalente.

Acting Exercise: Demon Possession [Exercice d’acteur : Possession démoniaque] documente une série d'acteurs improvisant en solitaire une possession démoniaque — ou du moins, le démon de leur imagination subjective. Ils tentent de dissoudre le seuil entre le réel et le surnaturel, en cherchant dans leur corps des indices détectables comme des grognements, des cris, des convulsions et des paralysies. La longue durée de chaque prise gonfle l'expérience du temps, engourdissant ou aiguisant la raison et la critique du spectateur. Comme dans Janus, le spectateur peut choisir d'étirer ou de limiter sa perception, et se convaincre d'être convaincu.