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© Maïder Fortuné et Annie MacDonell, OUTHERE (For Lee Lozano) (2021). Image tirée de la vidéo.

 
 
salle d'exposition
 

Maïder Fortuné et Annie MacDonell
Shadow Vision

Commissaire : France Choinière

Du 13 novembre 2025 au 17 janvier 2026
Vernissage le 13 novembre


Les œuvres de Maïder Fortuné et Annie MacDonell déploient une certaine quête de transcendance, ouverte mais lucide, qui s’exprime à la fois sur un plan formel et intellectuel. Tout autant pour les œuvres réalisées en collaboration que celles produites individuellement, c’est l’art et la vie – dans une perspective féministe – que font dialoguer les artistes pour que l’expérience personnelle serve de prémisse à imaginer des formes alternatives, parfois radicales, d’existence, d’apprentissage et de perception. Leurs étroites et répétées collaborations, cette manière d’unir idées et imagination, incarnent de façon tangible une volonté de repousser les limites du soi en réfléchissant différemment nos relations aux autres, et par extrapolation à la collectivité, suggérant qu’il s’agirait peut-être là de la seule voie vers un monde pensé autrement, hors des préceptes institutionnels. 

Les expériences psychédéliques et/ou extatiques, proches du sublime, sont des thèmes, des motifs, récurrents dans leurs œuvres et se posent comme une manière de scruter différents états de conscience pour secouer ou renverser ce qui serait les limites convenues de multiples normes : sociales, économiques, politiques, narratives, visuelles, plastiques, aussi. Bien que narration et image forment un tout indissociable dans leur travail, c’est dans la subjectivité propre à chaque forme, en quelque sorte dans les failles que suscitent l’ambiguïté et l’ubiquité du propos, que s’expriment tous les possibles.

Sans évoquer une vision catastrophique du monde, Fortuné et MacDonell suggèrent qu’un passage à vide, le sentiment d’une finalité, parfois soulage et laisse présager mieux.

- F.C.


Maïder Fortuné et Annie MacDonell
Une lumière égale (2025)

15 min

Constitué de contenus trouvés, récupérés ou générés numériquement — pouvant faire se rencontrer Derrida et le poète et prêtre du 17e siècle, John Donne, ou insérer de la poésie dans un fil de nouvelles — le plus récent film de Fortuné et MacDonell repousse les limites de ces rencontres improbables entre des sujets appartenant à différentes temporalités, entre le perçu et l’illusoire, ou entre des éléments terrestres ou cosmologiques pour proposer une appréhension du monde dans sa totalité. Utilisant le motif de l’éclipse comme pivot de leurs propos, les artistes rassemblent des récits et des représentations de la plus récente itération de ce phénomène en 2024 et d’autres qui remontent jusqu’à l’Antiquité. Suscitant une fascination collective, voire un émerveillement quasi mystique, tout autant que l’angoissante anticipation du chaos, l’éclipse semble symboliser un point de rupture dont le présent est absent — trop insoutenable? —, mais dont on reconnaît le passé et espère le futur. En ces temps où il est particulièrement ardu de tendre vers la lumière, l’œuvre de Fortuné et MacDonell y invite.

Maïder Fortuné et Annie MacDonell
OUTHERE (for Lee Lozano) (2021) 

32 min

En 1971, la peintre et artiste conceptuelle Lee Lozano donnait une présentation intitulée The Halifax 3 State Experiment à NSCAD (Nova Scotia College of Art and Design), une université canadienne alors réputée internationalement pour être une école d’art d’avant-garde. Débutant à 10 h et se terminant au coucher du soleil, la présentation de Lozano se déroulait en trois états successifs : sobre, sous l’effet du cannabis, puis sous l’influence du LSD. Bien que la documentation de l’événement se limite à quelques images horodatées et enregistrements audio, Fortuné et MacDonell suivent les méandres elliptiques de la présentation de Lozano à la recherche de révélations sur cette artiste énigmatique qui aspirait à une révolution totale de la vie et de l’art, estompant les frontières entre les deux. À partir de notes et de photographies d’archives, d’analyses observationnelles, de performances et même d’une interprétation astrologique, OUTHERE (for Lee Lozano) révèle des formes nouvelles d’images et d’idées en fusionnant des fragments de ce qui est révolu et appartient désormais au passé.

Maïder Fortuné et Annie MacDonell
Communicating Vessels (2020) 

31 min

Le titre de ce court métrage fait référence au principe des vases communicants selon lequel l’eau atteint le même niveau lorsqu’elle se distribue entre des récipients reliés entre eux. Ce phénomène sert ici de métaphore aux transmissions intergénérationnelles intangibles qui prennent forme dans l’art et la maternité. Le narratif du film est centré sur E., une étudiante en art d’une certaine arrogance, mais brillante, qui se démarque de ses collègues. La relation, décrite par sa professeure de cinéma, révèle des convergences évidentes entre les deux femmes. Les vidéos d’E., à la fois simples et intenses, sans affect mais profondément ressenties, s’inspirent et questionnent des œuvres conceptuelles emblématiques des années 1970 qu’à leur tour Fortuné et MacDonell remettent en scène avec la participation de performeuses. Les images capturées, où apparaissent aussi les réalisatrices, s’entrelacent et se superposent en transparence, ralliant ainsi toutes ces femmes dans leurs processus créatifs.

Annie MacDonell
Ego Death Trip (2021)

Impression lenticulaire chromogène montée sur aluminium

L’image originale de Ego Death Trip a été publiée dans le Toronto Star en 1967 et, tout à fait de son temps, donnait à voir une jeune femme calée avec désinvolture sur un sofa, la tête inclinée, repliée sur elle-même, et visiblement en plein trip psychédélique. Complètement reconfigurée par MacDonell, l’image est répétée et segmentée avec une technique similaire à celle des images lenticulaires créant l’illusion d’un mouvement ou d’une évolution de la silhouette. Alors que la jeune femme semble dans un état d’inertie total — du moins de son corps, puisque l’on peut s’imaginer que beaucoup de choses se passent dans sa tête et que la réalité s’y déconstruit — le spectateur pour donner forme et sens à l’image doit parcours celle-ci sur ses 4 mètres et demi de long.


Annie MacDonell 
Set and Setting (2020) 

Vidéo à deux canaux, 7 min 49 s 

LSO 25 protocols (2020)

Impressions numériques sur papier, surligneur

Poursuivant une réflexion sur les expansions psychédéliques du soi et la disparition de l’égo, le film à deux canaux Set and Setting a pour point de départ des représentations de la psychiatrie hallucinogène ou de la thérapie psychédélique, un traitement expérimental en santé mentale amorcé dans les années 50 qui est toujours en exploration aujourd’hui. Des illustrations animées d’essais cliniques sont entrecoupées par une iconographie céleste et sacrée qui fait de furtives apparitions. De manière similaire, LSO 25 Protocols déploie une fresque de rapports d’essais cliniques offrant un large éventail de documentation qui, bien que méthodique, reste insaisissable. Conscience collective et subjectivité individuelle se rencontrent pour imaginer de nouveaux modèles de coexistence — un soi au-delà du soi.


Maïder Fortuné
The yellow blind (2015)

7 min

The yellow blind, c’est la translation en images et en mots d’un même souvenir d’enfance partagé par deux sœurs. Une rencontre de la littérature et de la peinture qui révèle un moment d’extase intense ayant imprégné la vie et l’art de deux femmes, qui parle aussi d’une connexion singulière. Sont réunis dans The yellow blind des extraits de Moments of Being de Virginia Woolf et des prises de vue filmées à la Tate Modern de Londres d’un tableau de Vanessa Bell intitulé Abstract Painting. Fortuné cristallise en des images monochromes l’ubiquité de la mémoire, donnant une couleur aux mots et des mots à la couleur.

Les artistes remercient le Conseil des arts du Canada, le Conseil des arts de l’Ontario, Mécènes du Sud, la Fondation des artistes, et la Direction régionale des affaires culturelles Île-de-France.

Maïder Fortuné est une artiste et cinéaste. Attachée à une certaine rigueur formelle, son œuvre filmique mobilise l'attention de l’auditoire pour une véritable expérience de l'image et de ses procédés. Elle envisage le film comme un outil critique propre à ouvrir les représentations contemporaines à de nouvelles plasticités. Son travail a été montré dans des expositions en France et à l’étranger et fait partie de nombreuses institutions françaises publiques et privées (Centre Pompidou, CNAP, FNAC, FRAC, Musée de la chasse). En 2011, elle est pensionnaire de la Villa Medicis à Rome.  Depuis 2015, elle collabore étroitement avec Annie MacDonell autour de projets qui mettent un accent sur le récit comme forme, le féminisme comme politique vécue, la pratique de l’art et les pédagogies radicales, et les manières dont le langage et l'image se façonnent mutuellement. Leur film Communicating Vessels remportait le prix du festival de Rotterdam et du festival expérimental de Moscou en 2020. OUTHERE (for Lee Lozano) a fait partie du festival de Rotterdam 2021. Son dernier film Boomerang a été présenté au festival European Media Art Festival, au FID Marseille, ainsi qu’au festival de la Villa Medicis à Rome.

Annie MacDonell est une artiste visuelle et cinéaste. Sa formation en photographie et en pratiques de l’image continue de jouer un rôle central dans ses projets qui intègrent également l’installation, le film, la sculpture, l’écriture et la performance. Elle est titulaire d’un baccalauréat en beaux-arts de la School of Image Arts de la Toronto Metropolitan University (2000), et a poursuivi des études supérieures au Fresnoy – Studio national des arts contemporains, en France. Ses expositions solos récentes ont été présentées à la Audain Gallery (SFU), à la Kitchener-Waterloo Art Gallery, au Robert McLaughlin Gallery (Oshawa), à la Illingworth Kerr Gallery et à la Mackenzie Art Gallery. Elle a également participé à des expositions collectives au Art Museum de la University of Toronto, à la Contemporary Art Gallery à Vancouver et à la Mackenzie Art Gallery. Ses performances récentes ont été présentées notamment à la Nuit Blanche Toronto, au Centre Pompidou et au Toronto International Film Festival. En 2020, elle a été finaliste du Prix de photographie Banque Scotia. La même année, elle et Maïder Fortuné ont remporté le Tiger Award du meilleur court métrage au Festival international du film de Rotterdam pour leur film Communicating Vessels. Établie à Toronto, Annie MacDonell est professeure associée à la School of Image Arts de la TMU et membre fondatrice d’Emilia Amalia, un groupe féministe de recherche et d’écriture.



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Médiation

Rencontrez l’artiste

Le 13 novembre 2025 à 17 h

Annie MacDonell sera en conversation avec la commissaire France Choinière. Profitez de la présence de l’artiste pour découvrir les œuvres!

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Autre exposition

Callum Hill
E-Minor

Du 13 novembre 2025 au 17 janvier 2026


 

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